ECONOMIE

Prévention de la criminalité financière et renforcement de la gestion des finances publiques: Le GIABA renforce les capacités des membres des commissions des finances et du contrôle budgétaire des parlements des Etats membres de la CEDEAO

Le Groupe Intergouvernemental d’Action contre le Blanchiment d’Argent en Afrique de l’Ouest (GIABA) organise les 18 et 19 septembre 2025 à Lomé, au Togo, un séminaire régional sur la prévention de la criminalité financière et le renforcement de la gestion des finances publiques par l’intermédiaire des Commissions des Finances et du Contrôle Budgétaire (CFCB) des Parlements des États membres de la CEDEAO.

Ce séminaire vise à renforcer les connaissances des participants sur les cadres juridiques, les normes du Groupe d’Action Financière (GAFI) et les dispositions institutionnelles qui promeuvent l’intégrité de la gestion des finances publiques (GFP) ; doter les CFCB d’outils pratiques en vue d’interpréter les rapports d’audit, de détecter les signaux d’alerte et de recommander des mesures préventives et correctives ; faciliter l’apprentissage régional entre pairs sur les bonnes pratiques et leurs défis ; promouvoir une collaboration inter-agences plus étroite entre les CFCB, les institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ISCFP), les cellules nationales de traitement des informations financières (CENTIF), les agences de lutte contre la corruption, les agences chargées des enquêtes et poursuites pénales, la société civile et les médias ; élaborer des recommandations concrètes en vue de renforcer l’indépendance, la compétence technique et l’efficacité opérationnelle des CFCB.

En effet, les Commissions des Finances  et du Contrôle Budgétaire (CFCB) sont un pilier essentiel des mécanismes nationaux de gouvernance des finances publiques. Elles assurent par la surveillance cruciale en examinant les comptes du gouvernement et des organismes publics, l’examen des rapports d’audit publiés par les institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ISCFP) et la formulation des recommandations en vue des mesures correctives.

Elles contribuent également à combler les lacunes systémiques qui favorisent la criminalité financière, à promouvoir un meilleur rapport qualité/prix et à conserver la confiance du public dans les institutions étatiques.

Toutefois, dans de nombreux États membres communautaires, les CFCB sont confrontés à d’énormes défis qui compromettent leurs capacités à remplir leurs fonctions de manière optimale. Ces défis comprennent, entre autres, l’ingérence politique et l’absence d’indépendance institutionnelle ainsi que le manque de collaboration structurée avec les institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ISCFP), les CENTIF, les agences de lutte contre la corruption et les agences/départements chargés des enquêtes et des poursuites pénales ; etc.

Le GIABA, au-delà de sa mission principale de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et de la prolifération (LBC/FT/P), est engagé à promouvoir l’intégrité financière, la transparence et la redevabilité dans la gestion des ressources publiques comme moyen de préserver la stabilité économique et de renforcer la gouvernance démocratique dans l’espace CEDEAO.

Ce renforcement des capacités des CFCB apportera un double bénéfice stratégique en améliorant les systèmes de gestion des finances publiques (GFP) tout en prévenant la criminalité financière.

Le séminaire va également offrir aux participants un cadre unique en vue d’approfondir leur compréhension des liens entre la GFP et la criminalité économique et financière ; de renforcer leurs capacités techniques ; et de partager les expériences des pairs de toute la sous-région.

Durant deux jours, les participants vont échanger sur des questions essentielles, telles que : Comment doter les institutions parlementaires d’outils efficaces pour prévenir et détecter la criminalité financière ?; Quelles réformes adopter pour renforcer la traçabilité et la transparence dans la gestion des ressources publiques ?; et Comment bâtir une synergie durable entre Parlements, Gouvernements, organes de contrôle et société civile dans

ce combat commun ?

En ouvrant les travaux, le représentant du ministre de l’Economie et des Finances, la directrice de cabinet, Mme Akou Mawussé A. Adétou Afidenyigba, a indiqué que ce séminaire constitue une opportunité de réfléchir ensemble aux moyens de renforcer la gestion des finances publiques, de consolider le rôle crucial des Commissions parlementaires dans la prévention et la lutte contre ce fléau, tout en renforçant le cadre de la gouvernance économique de leurs États.

« En effet, les Commissions des Finances et du Contrôle Budgétaire de nos Parlementssont au cœur du dispositif de lutte contre la criminalité financières. Elles ont toute leur place dans les mécanismes de prévention et de lutte contre la délinquance économique. Leur rôle de contrôle, d’examen et d’évaluation des budgets est un puissant rempart indispensable contre les abus et les pratiques illicites. Dès lors, renforcer leurs capacités, c’est donner à nos démocraties des institutions fortes, solides et crédibles », a-t-elle laissé entendre.

Pour Mme Afidenyigba, gouvernance et capacité sont cruciales si l’on veut tarir les sources et les ressources de la criminalité financière.

« Nous avons besoin d’enquêteurs et d’enquêtes ; nous avons besoin d’engagement au niveau parlementaire. Dans la lutte contre les atteintes aux finances publiques qui doit constituer une priorité, un accent particulier devra être mis sur la gouvernance, les institutions et le renforcement des capacités que doivent porter nos efforts », a-t-elle fait savoir.

Elle a réaffirmé l’engagement ferme du Togo à poursuivre les réformes nécessaires en matière de gouvernance financière, à renforcer la coopération régionale et à promouvoir la tolérance zéro vis-à-vis de la criminalité financière.

M. Afidenyigba a exprimé sa gratitude à la CEDEAO, au GIABA et son équipe remarquable d’experts, aux Commissions parlementaires ainsi qu’à leurs partenaires techniques et financiers pour leur appui constant et multiforme.

Le directeur général du GIABA, M. EDWIN W. HARRIS JR, a révélé qu’on estime que l’Afrique perd plus de 88,6 milliards de dollars chaque année à cause de la corruption et des flux financiers illicites.

Ce chiffre alarmant, a-t-il poursuivi, soit l’équivalent de 3,7 % du PIB du continent n’est pas un chiffre abstrait. Il représente des salles de classe qui restent inachevées, des hôpitaux sans équipement, des infrastructures laissées sur la planche à dessin et, surtout, des opportunités présentes et futures refusées aux jeunes. Une telle hémorragie systémique des ressources enracine la pauvreté, creuse les inégalités et fait des sociétés un terrain fertile pour l’exploitation par les criminels et les groupes extrémistes.

« Au GIABA, en tant qu’institution de la CEDEAO, notre mission consiste à défendre nos économies et nos sociétés contre le fléau du blanchiment de capitaux, du financement du terrorisme et du financement de la prolifération. A travers les évaluations mutuelles, les études de typologies et une assistance technique, nous assurons le suivi des risques et renforçons les cadres de nos États membres. Nos études ont mis en lumière les vulnérabilités exploitées par les criminels : contrats de commande publique gonflés, travailleurs fantômes, surfacturations commerciales, criminalité maritime et, de plus en plus, utilisation détournée des systèmes financiers numériques et cyberfraude. Les récentes constatations du second cycle des évaluations mutuelles des États membres, qui vient de s’achever, ont clairement présenté les défis urgents des politiques auxquelles nous sommes confrontées. Par exemple, au nombre des principales constatations, citons les faiblesses importantes dans l’efficacité de la transparence des bénéficiaires effectifs et soulignent l’impact corrosif de la corruption et de la fraude, qui continuent de générer des produits illicites dans bon nombre de nos États membres. Ces vulnérabilités ne menacent pas seulement notre conformité aux normes internationales de LBC/FT, mais elles sapent également les fondements mêmes de la bonne gouvernance, de l’intégrité économique et de la confiance du grand public », a-t-il relevé.

Selon lui, ce combat ne peut être gagné par les seules autorités de réglementation et les CENTIF. La première ligne de prévention consiste en une gestion des finances publiques solide, transparente et imputable.Et à l’avant-garde de cette ligne de front se trouvent vous, les honorables membres de nos Commissions des Finances et du Contrôle Budgétaire, a-t-il fait savoir.

« Vous êtes les gardiens légaux des deniers publics. Vous êtes le lien crucial entre les constatations de nos institutions supérieures de contrôle des finances publiques et l’application du principe de redevabilité. Lorsque vous vous interrogez rigoureusement sur les dépenses, exigez des explications et insistez pour que des mesures correctives soient prises, vous faites plus que protéger les ressources des contribuables. Vous désorganisez la machine de corruption, obstruez les pipelines des flux illicites et renforcez les fondations de nos institutions démocratiques. Votre supervision n’est pas une formalité procédurale –il s’agit d’un impératif de sécurité nationale », a-t-il laissé entendre.

ALI

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